« au creux de cette nuit bouleversée, tempête obscure, étincelles d'écumes dans le noir, vagues comme des échafaudages qui s'écroulent, le bruit, les rafales sonores, furieuses de sons et de vitesse, lancées sur la croupe de la mer, dans les nerfs du monde, océan mer, colosse ruisselant, bouleversé - (…) qui l'aurait jamais pensé, qu'en embrassant les yeux d'un homme on puisse voir aussi loin – qu'en caressant les jambes d'une jeune fille on puisse courir aussi vite et fuir – fuir loin de tout – voir au loin »

REID/ELSA/REECE KING/PENSIONNAIRE/(©cynthiansitua/tumblr)

SILENCE

Silence.
Silencieux.

Fallait toujours te taire. Fallait toujours faire semblant de ne pas entendre. Ne pas écouter. Les gémissements de l’autre côté du mur. Les pleurs, les cris. Fallait toujours te taire. Ne pas appeler, non. Pas dans ces moments-là, jamais. Pour ne pas le voir venir. Pour pouvoir survivre. Parce que tu savais. Que y avait un truc pas beau. Que y avait un truc pas normal. Oué, tu savais. Mais, t’avais jamais vu. Mais, t’avais jamais voulu voir. Pour ne pas trop comprendre. Pour ne pas salir. Encore plus. Ton âme d’enfant. Ton cœur encore trop pur. Oué, surement. Pour tout ça. Pour toi. Pour eux. Mais l’enfant grandit. Et comprends mieux. Et se terre là, sous les draps. Silence, silencieux. Pour se faire un peu plus oublier. Pour qu’il oublie. Que tu es là. Pour qu’il oublie de te lancer ces regards. Trop lubriques. Trop bizarres.

   

LES MAINS FAMILIÈRES

Elles glissent.
Se faufilent.
Elles touchent et brisent.

Elles sont là sur ta peau chocolat. Caresses, convoitises. T’as les yeux fermés. T’as le cœur qui bat fort. Trop fort. Et les mains qui s’agrippent. Et tes dents qui mordent. Et tes larmes qui s’éteignent. Parce que y a plus rien à couler. Y a plus rien à donner. Un cri. Un murmure. Juste fermer les yeux. Juste oublier. Oublie. Pour ne pas entendre, pour ne pas se souvenir après. Pour ne pas l’entendre, elle. Lui crier dessus. Jalouse de toi. Son fils. Jalouse de toi. Enfant. Tu voudrais continuer à te cacher. T’aurais voulu ne jamais les voir. Les regards. Fuir avant. Fuir avant ça. Avant de te sentir brisé de partout. Avant d’avoir peur, de fermer les yeux. Peur de toucher les autres. Mais, l’enfant est incapable de fuir. Fuir, loin des parents. De la famille. Famille, trahison. Fermer les yeux. Pour ne plus entendre. Pour ne plus sentir. Les mains qui glissent, là, sur ta peau chocolat.

SILENCE

Silence.
Silencieux.

S’enfuir. Ailleurs. S’enfuir. Pour ne plus sentir. Ressentir. S’enfuir.
Y a plus un mot qui y glisse, là, entre tes lèvres. Y a plus un mot qui se fait entendre, de ta voix rauque. Non, rien. Silence. Pour fuir. Silence. Pour s’enfermer. S’enfuir. Loin, très loin. Silence. Qui inquiète. Silence. Qui alerte. L’enfant, adolescent. Ne parle plus. Les profs, l’infirmière, les docteurs. Silence, silencieux. Rien. Rien parce que c’est ce qui fait le moins mal. Ce qui fait le plus fuir. Rester là, enfermer dans ton chez-toi. Dans ton esprit. Dans ton monde à toi. Où rien n’est brisé. Où rien n’est abîmé, pas même ta peau, pas même ton cœur. Non rien. Alors, juste se taire pour oublier. Juste se taire pour pouvoir partir. Oui. Partir loin. Partir, s’enfuir.

« face à l'océan, elle est là. sa longue robe blanche - blanc écume, blanc neige - s'envole dans le vent. elle danse. lentement. elle danse et la mélodie semble résonner seulement dans son crâne - ou alors c'est le rythme du vent et des vagues qui porte ses mouvements doux. sans rien dire, elle se retourne et tend ses mains vers toi, comme une invitation. (est-ce un mirage, est-ce une sirène est-ce une fée, est-ce une princesse ?). »

Tu marches. Un pas après l’autre. Les pieds qui s’enfoncent, là. Dans le sable un peu froid. Un peu humide. Tu es seul. Seul avec le chant des vagues. Doux et brutal à la fois. T’aimes être là. Sur la plage. Seul dans ton silence. Celui dans lequel tu t’es cloitré, enfermé. Pour ne plus avoir mal. Ne plus avoir peur. Oui. Mais qui, pourtant. Parfois. Te ronges là, dans le cœur. Te ronges. Soupirs, sourires. Tu fixes la lune. Tu fixes la mer. Si belle si douce. Et c’est là. Là que tu la vois. Tu sais pas si tu rêves. Tu sais pas si tu es à l’ouest. Es-tu enfin devenu fou ? Fou. Un rire, un sourire. Elle danse. Belle dans sa robe blanche. On dirait la Dame Blanche. Celle qui prend la vie. Celle qui ronge et mange. Tu recules un peu. Parce qu’elle est là, les bras tendus vers toi. Non. Non. Tu ne veux pas de ça. Étreinte douloureuse. Y a ton cœur qui se met à battre violemment, ton corps qui se tend. Tremble. T’as peur. Peur horrible. Horrifiante. Un pas. Puis un autre. Pour reculer. Fuir. Fuir, comme tu sais si bien le faire. Fuir. Mais, les mains se rapprochent. Mais, le sourire se fend encore et encore. Visage trop proche. Mains trop proches. Elle avance encore et encore. Avec ce sourire. Ce rire. Ils deviennent encore plus grands. Encore plus proches. Sourires. SOURIRES. La grimace apparait. LE visage se transforme. MONSTRE. C’est lui, lui. Tu recules, encore et encore. Tu recules. Encore et encore. Et tu voudrais hurler. Et tu voudrais crier. Mais, y a ta voix qui reste coincée, là, dans ta gorge. MAIS….

Sursaut.
Larmes qui coulent.
Yeux qui s’ouvrent.

T’es là, le plafond sous tes yeux.
Tremblant, là, seul dans ton lit. Tu souffles.
Cauchemars, souvenirs.